002, SOLAR BORDER



Les guerres, les crises économiques ou identitaires sont autant de motifs pour un État, gagné par le doute et la peur, pour justifier la construction d’une muraille. Il faut alors fermer la frontière, la rendre hermétique, empêcher tout lien avec « l’autre côté ».
Si, sur le temps long, aucune de ces barrières matérielles n’a résisté à la pression des hommes, des armes, des idées, leur logique a toutefois structuré de nombreux projets politiques. Des générations entières ont vécu au quotidien avec ces murs, avant qu’ils ne soient traversés ou contournés, ou ne finissent par tomber.
Aujourd’hui, plus d’une cinquantaine de murs-frontières dans le monde illustrent le besoin de certains États de réaffirmer leur souveraineté avec force.


Si l’on excepte les frontières naturelles, qui ont constitué depuis les premières civilisations des barrières physiques à la mobilité humaine (océans, chaînes de montagne, fleuves), les frontières édifiées de main de l’homme ont eu tout d’abord la vocation de marquer son territoire, de se protéger de l’autre, du “barbare”. Les vestiges du mur d’Hadrien en Grande-Bretagne ou la Grande muraille de Chine attestent, en des temps et des lieux distincts, de ces préoccupations. Les frontières y compris intérieures ont également eu pour objectif majeur de contrôler les échanges de marchandises et les recettes fiscales des pouvoirs en place.
La structuration d’un monde en “blocs”, empires coloniaux, bloc communiste, a connu son apogée puis son effondrement à la fin du XXe siècle.
Il convient de s’interroger aujourd’hui sur la réalité à laquelle renvoie la notion de frontière. Tandis que la mobilité des personnes est synonyme de progrès et de modernité dans de vastes zones d’échanges supranationales, comme l’Union européenne dont les frontières intérieures sont ouvertes, d’autres États renforcent leurs frontières afin de limiter voire d’empêcher leur traversée. À l’utopie d’un monde sans frontières où chacun serait libre de circuler, de s’installer et de travailler s’oppose un contrôle renforcé voire une militarisation des frontières. L’ouverture s’efface devant la fermeture, la liberté devant le contrôle. La zone de passage, le lieu de contact et d’échange se transforme alors en un lieu d’exclusion et de conflit comme l’illustre la tragique actualité des différentes migrations.

A partir d’image de frontière, de mur de séparation, murs de la honte, glaner sur internet, je viens alors les réinterpréter par le biais de la broderie. Le médium utilisé ainsi que ces couleurs chatoyantes vient alors sublimer l’horreur et la suprématie d’un territoire face à un autre.

 



Broderies #1 à #5, Juin 2023
Fils de coton mats et satinés, satin de coton noir, frange dorée